Bonjour,
je viens de recevoir les actes publiés (aux éditions du Bord de l’eau) du colloque de Cerisy que j’avais co-dirigé avec mon collègue et ami Eric Maigret voici déjà cinq ans (la temporalité des universitaires n’est pas exactement celle des journalistes) sur les Cultural Studies / études culturelles. A vrai dire, c’est surtout Eric qui fit, alors, l’essentiel du travail, et qui est aussi le principal artisan de ce volume qui regroupe l’essentiel des communications. Pour ceux qu’intéresse ce courant de recherche né en Grande-Bretagne puis importé aux Etats-Unis avant de venir, tardivement et de manière encore partielle, en France, ce livre apportera nombre de textes éclairants, intrigants, passionnants, sinon toujours convaincants. De mon côté, j’avais tenté d’éclairer ce courant de recherche à la lumière d’un autre, celui de l’histoire culturelle, dans lequel je m’inscris et qui entretient avec les cultural studies des rapports de proximité et parfois – la preuve – de complicité, ce qui n’exclut pas aussi de vraies différences (et même quelques différends).
Voici le texte de la 4e de couverture, j’espère qu’il vous donnera envie d’y aller voir de plus près :
« Cet ouvrage, issu des actes d’un colloque de Cerisy, explore les théorisations les plus récentes en cultural studies (études culturelles), courant de recherche transdisciplinaire repérant le surgissement conflictuel du nouveau, les sites de contestation où prolifèrent des alternatives aux rapports de pouvoir cristallisés, en particulier dans les formes culturelles.
Les cultural studies accordent une place centrale à la question des identités. Elles ont enrichi les travaux sur ces dernières en démontrant, tout d’abord, l’importance des politiques de différences, ensuite, l’hétérogénéité des individus et des groupes, construits par des discours, pratiques et positions qui ne coïncident pas nécessairement, enfin, la possibilité d’un cosmopolitisme par le bas. En se confrontant aux craquement des cadres nationaux, postcoloniaux et de genre, qui engendrent de puissants effets de backlash, en débattant des modèles posthumains et du tournant ontologique, qui conduit à ne plus séparer humains et non-humains, les recherches actuelles abordent de nouvelles frontières.
Pour répondre aux réaménagements théoriques comme politiques, s’agit-il pour les cultural studies de verser intégralement dans les paradigmes posthumains? Face aux enjeux d’égalité de sexe, de genre, de classe et de race, de quels outils disposent-elles aujourd’hui? Quels sont les rapports entre les disciplines scientifiques traditionnelles et les cultural studies, singulièrement en France?
Ce panorama diversifié des débats que traversent et/ou mettent en forme les cultural studies, de leur(s) généalogie(s) comme de leurs effets sur les disciplines, se veut à la fois synthétique, didactique et heuristique. »
Le hasard veut que je reçoive ce livre la veille de la soutenance d’un de mes doctorants, Tommy Adam Vasques Vidal, qui participa à ce colloque, comme en témoignent ces photos (non compromettantes, j’espère! Dernier rang, blouson de cuir marron)
Tommy soutient demain, après six ans d’un dur et fructueux labeur, sa thèse sur la contre-culture brésilienne des années 1960 aux années 1990. En voici le titre :
Asdrúbal Trouxe o Trombone
Irrévérence et innovation au théâtre sous la dictature militaire brésilienne et la contreculture « desbundada » 1974 -1996
Cette thèse est centrée sur la troupe de théâtre Asdrubal Trouxe o Trombone, un nom que l’on pourrait traduire en français ainsi : « Asdrubal a apporté le trombone », qui fut l’un des collectifs artistiques les plus créatifs et influents de Rio de Janeiro, y compris durant les années noires de la dictature militaire. Tommy, qui a rassemblé des archives nombreuses et souvent inédites, montre comment cette troupe réussit à exister et à créer malgré la censure et la répression, et il met également à jour l’énorme influence qu’elle exerça y compris après sa disparition, en 1984, non seulement dans le théâtre mais aussi dans la musique, et, plus généralement, dans tous les arts de la scène du Brésil des années 1980 à nos jours.
Je suis très heureux – et fier – de voir ce travail de thèse s’achever, même si je regrette, évidemment, que la soutenance s’effectue entièrement « à distance », via une plateforme numérique. Espérons que tout fonctionnera bien et que nous aurons demain soir un nouveau « docteur en histoire »!
LM
PS : la soutenance s’est fort bien passée, dans une atmosphère à la fois sérieuse et détendue. Tommy est donc officiellement docteur en histoire de l’université de la Sorbonne-Nouvelle à Paris et de l’université Fluminense de Rio de Janeiro. Félicitations! Nous attendons maintenant la publication de son bel ouvrage, qui profitera des remarques de tous les collègues membres du jury que je remercie vivement.


